Aux Jardins Suspendus, au Havre, le dimanche 3 octobre, à 17h, aura lieu une vente aux enchères d'art contemporain, après exposition les 1er et 2 octobre. Cette vente est organisée par la Ligue Havraise pour l’aide aux personnes handicapées, le Rotary club Le Havre Océane, avec le soutien de la ville du Havre, au profit de la Ligue Havraise et de l'association Pian Piâne.
Dans un établissement de la Ligue, l'Institut Médico-Pédagogique, Quentin Pérochon, plasticien, travaille en ateliers avec des enfants déficients intellectuels ou autistes. De ces ateliers, avec des contraintes différentes selon les groupes et les moments, naissent des peintures, des collages, des expériences sonores, des photographies. Les enfants ont choisi leur nom d'artiste : MIRSA PEPENCE, anagramme de IMP ESPERANCE. Des oeuvres de Mirsa Pépence, essentiellement picturales seront en vente le 3 octobre, aux côtés de celles d'une dizaine de photographes, peintres, sculpteurs tels que Cédébé, François Cavelier, Hélèna Garbée....
Jean-Luc Moulène, artiste contemporain confirmé, qui utilise toutes sortes de médias, présentera une photographie à un prix de départ d'ami.
Dossier de presse / Exposition-vente d’art contemporain.
Texte de présentation association Ligue Havraise pour l’aide aux personnes handicapées et présentation de l’atelier Arts Plastiques de l’IMP.
La Ligue Havraise pour l’aide aux personnes handicapées, née en 1958 et reconnue d’utilité publique, est une association composée de parents, d’amis d’enfants, ou d’adultes en situation de handicap mental.
Au cours des 5 décennies, elle s’est développée en créant 18 établissements et services, mettant à disposition des modes d’accueil diversifiés.
Elle s’affirme, ainsi, dans sa mission première de répondre aux besoins et attentes des personnes en situation de handicap intellectuel et de leur famille sur Le Havre et sa région.
L’association développe des valeurs qui étayent sa mission :
- Promouvoir l’autonomie et la mise en œuvre des capacités des personnes handicapées par l’éducation, le travail, les loisirs et l’accès au logement,
- Respecter la dignité de chacun,
- Proposer un accompagnement tout au long de la vie de la personne handicapée et de sa famille.
L’IMP Espérance, établissement de la Ligue havraise, accueille 58 enfants âgés de 3 à 14 ans, présentant une déficience moyenne ou lourde avec troubles du comportement et de la personnalité.
Les enfants accueillis à l’IMP souffrent de déficits de communication, notamment verbale. Des carences du langage consécutives à un déficit intellectuel sont observées. Ce déficit résulte d’anomalies neurobiologiques, de troubles psychiques...
Certains enfants sont très énigmatiques et les clefs pour tenter de les comprendre sont peu nombreuses.
Une part importante de nos échanges sociaux est basée sur le langage articulé, sur les mots. Cette communication nécessite de posséder une richesse lexicale mais aussi d’en comprendre les subtilités, les sens cachés, les pièges, les registres. Sa maîtrise est complexe.
La création d’un atelier d’Art Plastique à l’IMP est un projet innovant. Cet atelier propose une alternative à la communication verbale. L’expression plastique peut être aussi riche et nuancée mais elle est, chez certaines personnes, plus spontanée, moins codée. Plus universelle aussi, elle facilite les échanges entre des origines culturelles différentes, qu’elles soient ethniques ou sociales. Elle apporte des solutions originales pour prendre en compte les différences liées au handicap. Les Arts Plastiques procurent de l’émotion en stimulant les sens. Ils sont intuitifs. Ils dévoilent tous leurs bienfaits quand les enfants de l’institut s’en saisissent, l’exploitent comme véritable outil d’expression pour partager leur perception du monde.
L’atelier a l’ambition de créer des œuvres d’Art originales et autonomes et de permettre aux enfants de développer un esprit critique dans une culture de l’image, symbole de notre société contemporaine.
L’ouverture sur le monde extérieur est aussi un objectif essentiel de cet atelier. S’exposer, se montrer aux autres finalise le processus créatif. Des expositions ont eu lieu dans les autres établissements de la Ligue Havraise mais aussi, et surtout, dans des écoles primaires, au Musée Malraux, dans une maison de retraite. Des rencontres avec des artistes, des visites culturelles ont renforcé encore cette volonté d’ouverture.
Aujourd’hui l’atelier a trouvé son nom d’artiste, Mirsa Pépence, c’est sous ce nom que nous retrouverons ses œuvres lors de la vente aux enchères publiques, dimanche 3 octobre aux jardins suspendus, et pendant les deux journées d’exposition qui précéderont.
PROJET PEDAGOGIQUE DE L’ATELIER DE CREATION PLASTIQUE
Institut Médico-pédagogique « L’Espérance », 11 rue Arquis, 76620, Le Havre
2008/2009
(Extrait)
Atelier de création conçu par Quentin Pérochon, animateur socio-éducatif diplômé en arts plastiques (DNSEP).
L’atelier de création plastique s’adresse à 56 enfants de l’Institut Médico-pédagogique et à 6 enfants de l’Arbre à papillons (structure autisme).
La prise en charge de 56 enfants de l’IMP se fractionne en 9 séances hebdomadaires.
La prise en charge de 6 enfants de l’AAP constitue une demi-journée hebdomadaire.
S’ajoutent 3 séances de prises en charge individualisées (2 ou 3 enfants par séance).
Le jardin d’enfants. 6 enfants (4/6 ans).
Le temps de concentration des enfants du J.E. est le facteur primordial à prendre en compte pour l’élaboration de chaque séance. Un créneau horaire de 90 minutes est alloué à ce groupe. Ce temps est inadapté. Il a donc été décidé de diviser le groupe en 3, à raison de 30 minutes pour chaque binôme. Le fait que ces enfants entretiennent avec l’adulte une relation très exclusive motive encore ce choix.
Les objectifs éducatifs dans cet atelier sont basiques (rester assis, faire ce qui est demandé…).
Les besoins essentiels de ce groupe en arts plastiques sont sensoriels.
Projections lumineuses, lumière noire, espace sonore, diffusion d’odeurs… modifient l’environnement habituel des enfants et les incitent à jouer avec lui. Ces dispositifs permettent de stimuler les enfants et les invitent à trouver un sens, une fonction aux objets présentés.
La variété des dispositifs permet aussi de séquencer la séance en micro activités de 5 ou 10 minutes.
Les pré requis en ce début d’année ne sont pas établis (tenir un outil, ne pas manger les objets, la peinture…). L’objectif principal du second semestre se situera dans l’acquisition de ces pré requis. Le but sera d’obtenir les premiers signes graphiques ainsi que la découverte d’un intérêt à des manipulations simples (déchirer, tracer, trouer, empiler, etc.).
Une part importante de l’atelier sera consacrée au modelage de l’argile. Cette technique tactile, sensuelle et apaisante convient particulièrement à ce groupe et sert de support pour mettre en place les objectifs du second semestre.
Les séances permettent également de chercher des solutions éducatives originales aux troubles comportementaux envahissants. L’atelier doit être un espace ou l’enfant peut jouer temporairement avec ses troubles plutôt que de les réprimer. Il doit être un lieu d’expression, un lieu où les obsessions, les frustrations, les peurs, les comportements inadaptés s’expriment au sein d’un cadre précisé et organisé.
Les groupes éducatifs. 12 enfants répartis en 3 groupes (6/14 ans).
Le travail avec les groupes éducatifs sera surtout une consolidation et un élargissement du champs des savoirs basiques (tenir un outil, l’exploiter de façon appropriée, respecter les règles collectives…).
L’objectif de l’année sera d’utiliser au mieux ces savoirs de base pour acquérir une méthode. Exploiter son savoir pour construire. Mettre en place des stratégies pour élaborer des projets simples et les réaliser.
Cet objectif amène à travailler la question du temps de concentration et la qualité de cette concentration. Savoir focaliser son attention sur un objet, réfléchir, s’organiser sont des étapes à acquérir.
Un des enjeux majeur sur ces groupes découle de cette question de la focalisation, de l’attention. Savoir isoler son attention, savoir s’extraire temporairement de son environnement, de l’agitation, des stimuli qui parasitent la qualité de la concentration. Savoir hiérarchiser les informations extérieures. Etre capable d’oublier l’autre, adulte comme enfant, pour réfléchir soi même à des stratégies constructives.
L’aménagement de l’espace de travail induira la réussite de ces objectifs. Il est impératif de concevoir un aménagement en plusieurs postes de travail autonomes. Un atelier collectif mais où chacun développe une série de petits projets personnels.
La condition sera également de savoir évaluer ses compétences pour être en mesure d’aboutir son projet.
Les groupes des moyens. 16 enfants répartis en 2 groupes (6/10 ans).
Une partie des objectifs rejoignent ceux énoncés plus haut avec les groupes éducatifs.
La focalisation, la concentration, la réflexion autonome soufrent de carences importantes sur ces groupes de moyens. Le « zapping » intellectuel, l’incapacité de faire des choix et
de s’y conformer appauvrissent les séances d’art plastique. L’exigence première concernera le temps de concentration. Cependant, le nombre d’enfants et les conditions matérielles ne permettent pas d’aménager des espaces individuels. Il faudra donc installer des petits espaces de travail adaptés à des petits groupes et alterner avec un espace de travail commun où chacun va mener à terme son projet.
L’intérêt est grand dans les deux mises en place puisqu’il va s’agir pour l’enfant de chercher activement des influences chez l‘autre, sélectionner ces influences pour les intégrer dans sa propre démarche et sa propre réflexion. S’ouvrir aux autres pour s’en enrichir. Acquérir un sens critique pour s’individualiser. Pour le moment, ces enfants sont extrêmement influençables en raison de ce manque de recul critique, ce manque de jugement personnel.
Contrairement aux groupes déjà décrits, la complexité de l’imagination, la puissance d’invention sont les atouts importants de ces groupes de moyens et définissent leur identité de groupe. C’est un terreau immense pour un atelier de création. Ces enfants ont développé un univers imaginaire singulier et riche. Et ils n’ont pas encore suffisamment de tabous ou de doutes pour dégrader la spontanéité de leur expression. La plupart de ces enfants s’est construit une cosmogonie personnelle, nourrie de nombreuses influences culturelles (livre, télévision, etc.).
Cependant, en raison du manque de discernement ou même de troubles véritablement psychotiques, un travail important devra s’effectuer pour qu’ils sachent différencier leur univers onirique et fictionnel des lois réelles et des choses concrètes.
Les groupes des grands. 20 enfants répartis en 3 groupes (10/14 ans).
Avec ces groupes de grands, la confiance en soi, l’assurance, la persévérance seront les problèmes essentiels auquel il faudra trouver des solutions. Les handicaps ajoutés aux doutes partagés par tous les pré-adolescents ou adolescents font que ces enfants éprouvent des difficultés à affirmer leur identité, leurs qualités et leurs compétences.
Le travail consistera surtout à valoriser les acquis et à affirmer son identité, si différente soit-elle des autres.
La valorisation du travail de création amènera le groupe à se questionner sur la monstration de ce travail, à sa présentation aux autres, à son inclusion à l’extérieur comme à l’intérieur de l’établissement ou de l’association.
Pour cela, seront mis en place des projets permettant une ouverture sur le monde extérieur. (Exposition collective avec les écoles primaires havraises participantes, concours de bandes dessinées d’Angoulême, édition…)
Cette démarche implique de s’investir dans des projets élaborés et complexes, d’en surmonter toutes les étapes de création. L’inscription dans un projet avec calendrier, échéance implique d’apprendre à s’organiser. Cela oblige de maintenir un effort sur de nombreuses séances pour un objectif unique.
Ce programme fait intervenir de nombreux savoirs transversaux. Rédiger et envoyer une fiche d’inscription à un concours par exemple, localiser un lieu sur un plan, découvrir une langue étrangère, rechercher l’histoire de sa famille ou de sa ville etc…
Les prises en charge individualisées.
Trois plages horaires sont réservées (3,75 heures en tout) aux prises en charge individualisées. Il a été décidé que 9 enfants par trimestre en bénéficieront.
Ces prises en charge s’adressent aux enfants qui demandent un temps plus conséquent de séances d’arts plastiques. Mais également aux enfants dont on a observé que les besoins d’expression ne sont pas pleinement satisfaits. Enfin, ce temps est consacré aux enfants dont les difficultés de communication courante perturbent le développement.
La création plastique comme moyen de communication non verbale, comme moyen d’expression alternatif aux modes de communication usuels prend ici tout son sens.
Ces séances s’élaborent de façon empirique et sont basées sur l’observation du caractère singulier de chaque enfant. L’évaluation des besoins des enfants se fonde sur une relation privilégiée de dialogue et d‘écoute.
Lors de ces séances, les enfants peuvent expérimenter des manipulations impossibles à réaliser en grand groupe. Le cadre y est beaucoup plus souple et à la fois plus précis. Ce sont les enfants qui expriment leurs désirs et déterminent leur pratique,
Pour l’adulte, il s’agit d’un véritable accompagnement dans une démarche propre à chaque enfant.
L’atelier se déroule dans un espace autonome de l’établissement. L’aménagement du lieu, la disposition du mobilier et des outils de travail sont des facteurs essentiels de la qualité des séances. Une conception de cet espace, adaptée aux différents publics accueillis, régule les problèmes comportementaux ou psychologiques. La configuration de l’atelier est modulable pour permettre de répondre au mieux aux besoins spécifiques de chaque groupe, privilégier par exemple la sécurité chez les petits quand sera privilégiée l’autonomie chez les plus grands. L’atelier doit créer une ambiance accueillante et calme où les enfants inhibés ayant besoin d’une pause dans la vie collective peuvent se détendre et se concentrer sur leur production plastique. A l’opposé, cet atelier doit aider les enfants trop actifs à gérer et canaliser leur excitation. Pour résumer, cet atelier doit être le lieu où tous les troubles liés au handicap doivent être maîtrisés pour s’épanouir dans le cadre de l’expression plastique. Le rôle de l’adulte sera d’accompagner chaque enfant dans une meilleur connaissance de soi, et donc une meilleure maitrise de soi, par le biais des arts plastiques. L’expression plastique peut devenir une formidable alternative à une communication orale souvent défaillante, un support pour exprimer des sensations difficiles à décrire autrement. Le pouvoir de la création artistique est de révéler du sens en manipulant des matériaux (son, image, texte etc.). L’utilisation du texte au sein de l’atelier est un bon exemple. Le texte, le mot, deviennent des matériaux et non plus des outils de communication comme dans leur emploi courant. Leur forme, leur sonorité importent autant que leur fonction. Leur manipulation (modelage, assemblage, découpe…) va permettre l’émergence d’un sens non anticipé. Cette utilisation de la langue et de l’écrit désinhibe l’enfant. Le public accueilli par l’IMP est particulièrement en situation d’échec face à l’apprentissage de l’écrit. Cette méthode de manipulation des mots, de jeu, de réinvention des règles et des conventions aide les enfants à se sentir en confiance dans les apprentissages scolaires.
L’utilisation du microphone et de l’amplificateur par les enfants qui n’ont pas ou peu accès au langage articulé décline cette même logique.
La création permet de se dessiner, de révéler son imaginaire propre.
L’atelier sera l’espace de la question ontologique, le langage de soi, l’émergence de sa propre expression. C’est essentiel pour ce public facilement démuni face à l’influence de l’autre. Enfin, dans un établissement où l’objectif premier est de rendre ces futurs adultes les plus autonomes possible, un atelier comme celui-ci a toute son importance.


Merci de contacter mirsa.pepence@free.fr pour toute demande d'exploitation ou de diffusion du contenu de ce blog, texte ou image.
