Le jardin-forêt du fort














PARIS-NORMANDIE
Une forêt jardin au fort de Tourneville
Stéphane GOUEL
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Publié 22/11/2017


Initiative. Un jardin potager d’un genre nouveau va prendre racine sur les fortifications du fort de Tourneville.Le fruit d’une année de réflexion pour l’association Fort ! Et des premières plantations qui démarrent aujourd’hui.
Le fort de Tourneville multiplie les initiatives de reconquête de ses espaces naturels. Après l’ouverture au public, cet été, d’une bergerie avec sa meute de moutons dans un vaste secteur de sous-bois à l’est, c’est à présent aux fortifications nichées à l’ouest d’ouvrir le champ des possibles. À grand renfort de pelles mécaniques et de terre végétale, 300 m² de surface cultivable ont pu ainsi être dégagés. Plusieurs semaines de labour nécessaire avant d’accueillir les premières plantations qui commencent aujourd’hui. Un important travail de culture participative puisque doivent se rejoindre des jardiniers de passage, des voisins, des habitants, des artistes résidents du Fort, l’hôpital Pierre-Janet et sa structure EM2R, l’AHAPS, l’IMP L’Espérance, des collégiens et différents services de la Ville du Havre.
Et cette date du 23 novembre n’est pas le fruit du hasard. Elle tombe en pleine effervescence du salon Réinventif qui ouvre ses portes demain à l’entrée sud du fort (lire encadré). « C’est un projet que l’on mûrit depuis près d’un an, explique Antoine Allain, coordinateur de « Fort ! », l’association qui fédère toutes les structures culturelles ayant élu domicile dans l’ancien bastion militaire. Quand sont venues les idées de réaménager le site, on s’est aperçu qu’il y avait deux espaces verts immenses de chaque côté du fort. Une parcelle plutôt destinée à l’écopâturage, avec la bergerie et les moutons, et une autre sur laquelle on pourrait imaginer des jardins potagers ».
Une forêt-jardin
Si, par le passé, un petit groupe d’habitants avait déjà tenté de planter sur cette parcelle, « au fur et à mesure de l’avancement du projet, on a découvert des gens passionnés de permaculture, un nouveau mode d’agriculture. Ce qui nous a conduits à collaborer avec Louise Géhin, une éco-agronome chargée du suivi des programmes scientifiques à la ferme biologique du Bec Héllouin/Institut Sylva », éclaire le coordinateur. À intervalles réguliers, et sous les conseils avisés de cette spécialiste, « des groupes de travail se sont constitués pour imaginer les jardins de demain mais surtout quelles pouvaient être les attentes du public, ajoute Antoine Allain. On a emmené un groupe constitué d’habitants et du centre social Val Soleil à la ferme du Bec Hellouin pour qu’ils s’inspirent des lieux ». Un cadre bucolique exemplaire où, collégialement, la décision a été prise de créer une forêt-jardin comestible sur la parcelle. « Ce modèle existe depuis toujours dans l’agriculture mais il a été remis au goût du jour par le biais de la permaculture », souligne Antoine Allain. S’inspirant de l’écologie naturelle et de la tradition, la permaculture repose sur une éthique de vie basée sur trois piliers : le bien-être de l’Homme, la préservation de la nature et le partage équitable dans la société. « Un jardin forestier, c’est sept strates identifiées qui vont de la canopée en passant par le sous-bois jusqu’au sous-sol du terrain », explique Antoine Allain. Autant de surfaces différentes à exploiter tout en ayant le moins d’entretien possible. « On a réfléchi à des zones bien définies,observe encore Antoine Allain. Des plantes vivaces que l’on n’a pas besoin de replanter chaque année, des arbustes fruitiers, des aromates, des légumes... Et faire en sorte que les gens viennent de manière régulière, soit pour récolter ou pour regarder ». Lieu de balade ou de contemplation, ce jardin est aussi un bel exemple de coopération avec les différents services municipaux. « Les espaces verts nous ont fourni des plaquettes de bois pour aménager les chemins entre les parcelles cultivées » apprécie David Amiard. Ou encore le service écopédagogique qui dispose déjà d’une quinzaine de jardins partagés en ville. « Il va nous aider à développer et animer ce nouveau type d’agriculture », s’enflamme le régisseur de l’association Fort ! Un modèle unique en France ? « Dans le sens de forêt comestible urbaine, en plein cœur d’une ville, ça n’existe quasiment pas », avance-t-il.